Une histoire de l'interprétation
des arcanes
Nous ne savons pas exactement à quel moment quelqu'un a eu l'idée d'utiliser un jeu de cartes à jouer, pour l'utiliser comme outil de voyance. La chose s'est évidemment d'abord produite de manière orale, avant que des auteurs ne fassent imprimer ces théories. Voici donc une sélection (loin d'être exhaustive) d'ouvrages majeurs, pour tarophiles avancés… |
Une tradition orale
Aucun écrit ne nous dit où et comment une
personne eut l'idée d'utiliser un jeu de cartes pour proposer
une voyance…
Risquons- nous alors à une fiction historique. La scène s'est produite
au milieu du xvıııe
siècle dans une taverne de la province française, à
moins que ce ne soit dans une autre région de l'Europe. Là, quatre gens
du peuple terminent une partie de tarot. Les perdants, un peu vexés,
quittent alors la table pour laisser les deux vainqueurs savourer ce
petit moment de gloire. C'est alors que, évoquant son
rendez-vous galant du soir avec une jeune fille, le premier partage ses
doutes avec son ami. Celui-ci, plus imaginatif que joueur,
sépare
alors les atouts
des autres cartes et propose à son ami de retourner une carte pour voir
ce qu'il en sera. La carte du pendu retournée, voilà notre premier
taromancien qui s'enquit « Au premier rendez-vous, elle tombera dans
les
bras, mais elle t'en fera voir de toutes les couleurs et tu deviendra
dépendant d'elle. » La taromancie était lancée et il n'y aurait
certainement pas longtemps à attendre avant que des auteurs se mettent à écrire sur ce sujet…
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L'histoire de la taromancie a
peut-être tout simplement commencé après une partie de jeux de cartes
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Les premiers écrits
C'est en 1780, qu'Antoine
Court de Gébelin publie ce que l'on peut considérer comme le premier
guide d'interprétation des vingt-deux arcanes majeurs. Dans son Monde primitif analysé, il propose des associations libres
entre les images et certains symboles (mais dans laquelle ne figure alors aucune méthode de tirage). Il
sera suivi de près par
Etteilla (Jean-François Alliette) qui quant à lui, propose une méthode de
tirage adaptée à son jeu de soixante dix huit cartes, très ésotérique et particulièrement égyptisant. Quelques
auteurs suivront, chacun avec leur méthode personnelle : Eliphas Lévi auquel on doit l'inversion du monde et du Fou
(Le livre d'Hermès,
Dogme et rituel de
la Haute magie, 1854-1856), Papus
(Le tarot de bohémiens,
1889 puis Le tarot
divinatoire, 1909), Arthur
Edward Waite (The key to
the Tarot, 1911) et
l'incontournable Oswald Wirth (Le
tarot des imagiers du Moyen-âge, 1927
puis Introduction à
l'étude du tarot, 1931).
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1889 : Papus
Dans son Tarot
des Bohémiens (1889), l'auteur
préconise le tarot italien, celui de Besançon et celui de Marseille
qu'il présente comme étant « les meilleurs sans contredit que
nous
possédions aujourd'hui, surtout le dernier, qui reproduit assez bien le
Tarot symbolique primitif ». Il illustre également son ouvrage
du tarot
d'Oswald Wirth paru la même année. De même qu'Etteilla, les
interprétations présentées
par Papus sont
particulièrement égyptisantes. Comme à son habitude, Papus signe là un
ouvrage volumineux dans lequel il déploie toutes sortes de théories
ésotériques inspirées.
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La Tempérance d'Oswald Wirth
dans Le tarot des
Bohémiens de Papus
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1927 : Oswald Wirth
C'est en tant que secrétaire de Stanislas de Guaita et
sous ses directive, que Oswald
Wirth dessine son premier tarot en 1889.
Franc-maçon très impliqué au sein de la société, auteur de nombreux
ouvrages et éditeur de la publication Le Symbolisme, il
écrit un ouvrage magistral en
matière de taromancie et qui deviendra un classique : Le
tarot des imagiers du Moyen-âge (Émile Nourry,
1927). Cet
ouvrage synthétise la plupart des idées déjà émises par ses
prédécesseurs, les structure avec pédagogie et y apporte des éléments
supplémentaires pertinents. Il écrira un deuxième ouvrage, de petit
format :
Introduction à
l'étude du tarot (Le symbolisme, 1931).
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L'ouvrage d'Oswald Wirth et la
pochette présentant les vingt-deux arcanes en onze planches à découper
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1949 : Paul Marteau
En 1930, Paul Marteau, directeur de l'entreprise qui
édite les jeux de cartes Grimaud, modifie un des tarots de son
catalogue et le renomme Ancien
tarot de Marseille. Il s'inspire de la mise en
couleur du
tarot de Nicolas Conver de 1880 aux teintes très vives. Après quelques
années, ce collectionneur de cartes à jouer et féru d'ésotérisme a
l'idée d'accompagner son tarot d'un livret d'initiation.
Puis en 1949, il publie Le
tarot de Marseille
(Arts et métiers graphiques, 1949). Cet
ouvrage ambitieux présente le tarot en profondeur et y fait figurer les
soixante dix-huit arcanes tout en couleurs, ce qui est une première
dans la littérature taromantique. Ce livre inspirera toute une
génération de
cartomancien de la deuxième moitié du XXe siècle.
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La couverture de l'ouvrage de
Paul Marteau, (composée par Rémy Peignot et gravée par Gilbert Poilliot)
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Les années 1970
Le succès
du tarot de Grimaud ne se dément pas et l'ouvrage de Paul Marteau
stimule les taromanciens en herbe qui se mettent à écrire leur
propre ouvrage. D'autres livres paraissent,
d'abord timidement, puis à un rythme soutenu à partir des années 1980
et cela, jusqu'à aujourd'hui. La plupart de ces ouvrages utilisent et
représentent le tarot de Marteau-Grimaud, devenu le standard en matière
de cartomancie. D'un point de vue théorique, on retrouve des grandes
idées directrices, mais chaque auteur interprète aussi les arcanes
selon sa sensibilité propre. Aujourd'hui, ces livres se comptent par
centaines et il est difficile d'en citer un qui sorte du lot. Cependant…
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À partir des années 1970, la
production d'ouvrages traitant du tarot de Marseille s'accroit
démesurément
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2004 : A. Jodorowsky et M. Costa
L'artiste inclassable Alexandro Jodorowsky (mime,
acteur, cinéaste, scénariste de bandes dessinées, auteur, etc.)
intéressé par les tarots depuis son enfance rencontre Philippe Camoin
avec qui il réalise un tarot inspiré du tarot de Nicolas Conver, mais
avec une palette de couleurs et des détails graphiques originaux. Fin
taromancien, Jodorowsky utilise dorénavant ce jeu de cartes pour ses
séances de tirages et écrit avec Marianne Costa La voie du tarot (Albin
Michel, 2004). Cet ouvrage, par la qualité de son écriture (alternant
théorie avec des récits de la vie de Jodorowsky), inspirera un grand
nombre de tarophiles.
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Jodorowsky et Costa signent un
ouvrage qui fait la synthèse de l'existant et proposent une structure
d'ensemble originale
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Et ensuite…
Nous ne sommes qu'à un moment de cette grande
histoire. Quel regard porterons-nous sur la période actuelle dans
cinquante, cent ou cinq-cents ans ? Quelles théories seront retenues et
encore mises en applications ? Et quelles voies prendra le tarot dans
la vie des prochains taromanciens. Voilà des questions qui, tout
en nous repositionnant dans notre temps, nous laissent
entrevoir un des aspects essentiels de ce support visuel : son
infinité.
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