Étude des symboles ésotériques
Réalisé à partir des dessins d'Oswald Wirth, tels que reproduits dans son Introduction à l'étude du tarot, le tarot ésotérique résume les atouts à leur plus simple expression : « Ramenés à la sobritété d'idéogrammes, les vingt-deux arcanes peuvent constituer un alphabet symbolique facile à tracer sur des cartons numérotés. »1 Oswald Wirth n'ayant jamais commenté lui-même ces symboles, nous nous essayons à leur étude, en nous accompagnant d'extraits de l'auteur. Analyse des cinq premiers arcanes…

Tarot ésotérique d'après Oswald Wirth
Le tarot ésotérique d'après les dessins originaux d'Oswald Wirth,
tirés de son Introduction à l'étude du tarot

I : Le Bateleur
Dans l'imagerie de l'Égypte antique, l'œil oudjat (irt oudjat) est un symbole du dieu faucon Horus. Oudjat correspond au verbe « se préserver » ou au mot « protection ». Contrairement au mauvais œil des sorcières que l'on rencontre dès l'antiquité babylonienne, la représentation de l'œil oudjat est de bon augure. Organe de la vue et, par extension, symbole de la compréhension et de l'intelligence (Binah, troisième séphirah de l'arbre de vie kabbalistique), l'œil est le premier outil de l'homme pour apprendre et décider avant d'exécuter. C'est donc en toute logique que l'œil est ici surmonté d'une couronne (Kether, première sephirah de l'arbre de vie kabbalistique). Remplaçant l'habituel lemniscate du chapeau du Bateleur, elle précise le caractère royal du pouvoir que donne l'intelligence, attribut des hommes soustraits à la volonté d'autrui, donc libres.

Symbole du tarot d'Oswald Wirth - 01 - Le Bateleur
II : La Papesse
La croix ansée, ou ânkh, est un hiéroglyphe égyptien signifiant « vie ». Mais, non exculsive de l'antiquité égyptienne, elle apparaît encore au ve siècle après J.-C. dans le codex Grazier et plus récemment en couverture de l'ouvrage de H. G. Wells ainsi que dans son titre latin : « Crux ansata ». Attribut des dieux égyptiens, elle trouve de nombreuses interprétations dues à sa forme évocatrice. Suivant ces analogies visuelles, Oswald Wirth utilise parfois cette croix à la place du symbole de Vénus (déesse de l'amour) dont la partie évidée de l'anse ci-contre en forme de cœur, fait un rappel. Elle peut aussi être rapprochée d'une des deux clés que tient la Papesse du tarot d'Oswald Wirth, c'est alors une clé sans panneton, qui peut entrer dans toutes les serrures et à laquelle il faut être initié pour en faire un passe-partout.

Symbole du tarot d'Oswald Wirth - 02 - La Papesse   
III : L'Impératrice
Le triangle, pointe vers le bas, est le symbole de l'élément eau ; le cercle surmonté d'une croix une alternative à celui de la terre (ainsi que celui alchimique de l'antimoine). On peut donc y voir une parcelle de terre entourée d'eau, telle une île dévoilant sa partie visible (le conscient) et masquant l'autre invisible (l'inconscient). « Le diamètre horizontal qui partage le cercle y devient un firmament séparateur des eaux supérieures et des eaux inférieures »2. Ce cercle divisé en deux (le soi scindé en un conscient et un inconscient) est le symbole du sel des alchimiste. Dans le quotidien, le sel est un ingrédient de la table, dont le rôle est de donner du goût à ce qui n'en a pas. Mais d'un point de vue alchimique, « le sel est à la base de otut ce qui prend forme. Tout s'engendre par son intermédiaire, grâce à l'action combinée du soufre et du mercure »2

Symbole du tarot d'Oswald Wirth - 03 - L'Impératrice  

IIII : L'Empereur
Le triangle, pointe vers le haut, est la représentation de l'élément feu. Soubassé d'une croix, il forme le symbole alchimique du soufre. « Comme l'idéogramme du soufre nous le révèle, [les alchimistes] entendaient par ce terme allégorique le feu réalisateur emprisonné dans le noyau de chaque être. Cette ardeur vitale, se manifestant du dedans au dehors par les phénomènes de développement et de croissance, est en réalité le principe contructeur de tout organisme »3. Dans son interprétation trinitaire, le soufre est l'esprit (alors que le sel et le mercure sont respectivement le corps et l'âme), ce qui donne là aussi matière à spéculations. En relation avec l'image traditionnelle du quatrième arcane du tarot, les trois côtés du triangle peuvent être mis en relation avec les trois pétales de la fleur de lys du sceptre de l'Empereur, alors que la croix renvoie aux jambes croisées et à l'élément surmontant l'orbe.

Symbole du tarot d'Oswald Wirth - 04 - L'Empereur   
V : Le Pape
Le pentagramme représente la domination de l'esprit sur la matière : quatre de ses branches sont les membres de l'homme, la cinquième (celle du haut) étant la tête (à la manière de l'homme de Vitruve de Léonard de Vinci). « [L'étoile des sages] instruit ceux qui doivent conférer l'enseignement initiatique. Son doux éclat n'éblouit pas comme celui du Soleil ou même de la Lune »4. L'idéogramme ci-contre ne se limite pas à une signification unitaire de l'étoile, puisqu'elle est accompagnée de cinq entités qui viennent s'intercaller entre chaque pointe de l'étoile : « Mais une lumière pénétrante émane de l'étoile connue des initiés. Son rayonnement ne s'arrête pas à la surface des choses, car il révèle l'ésotérisme, qu'ont toujours poursuivis de subtils abstracteurs de quintessence. Le Pape n'ignore rien à cet égard, puisqu'il a mission de faire connaître la réalité intelligible qui se dissimule derrière le masque des apparences sensibles. »4


1 : Oswald Wirth, Le tarot des imagiers du Moyen Âge, Paris, Émile nourry, 1927 (page 314).
2 : Oswald Wirth, Le symbolisme hermétique (dans ses rapports avec l'alchimie et la franc-maçonnerie), Paris, Le symbolisme, 1931 (page 16).
3 : ibid. (page 34).
4 : Oswald Wirth, Le tarot des imagiers du Moyen Âge, Paris, Émile nourry, 1927 (page 122).

Symbole du tarot d'Oswald Wirth - 05 - Le Pape